L'éloge funèbre est un exercice qui la plupart du temps Ne se conjugue qu'au passé, simple ou composé A l'imparfait. Imparfait, certes tu l'étais, car bien souvent Nous t 'avons pris en flagrant délit D'amitié débordante Pris aussi en récidive De fraternité, et de cette joie profonde que tu savais si bien communiquer.
Bien avant nous tous de la Confrérie du vignoble Tu as planté la vigne en contrebas de ton jardin. Le tout premier, tu as fait du vin, que tu nous faisais déguster, Les yeux pétillants d'amitié. C'est toi aussi qui as retrouvé la trace De ce petit bijou serti pendant des siècles Au creux de l'Abbaye de Villers, Le vignoble de l'abbé ! Avec Henri Gilles que tu rejoins aujourd'hui, Et quelques amis toujours bien vivants bons vivants, Qui sont ici, qui te souhaitent bon vent, Nous sommes descendus vers la Thyle, côté moines Presque tous affiliés comme toi A la redoutable Boulevard Neuf Connexion, Abattant les pioches sans perdre trop de temps A éponger la sueur de nos fronts, Plantant et bichonnant la vigne Puis, au tournant du vingt-et-unième siècle Récoltant les premiers espoirs …du futur nectar. Villers-la-Vigne était née ! Pendant de longues années, tu en fus aussi le trésorier.
Le tout premier aussi, tu as entonné « Amis, il faut faire une pause » Nous te revoyons Jean, armé de ta radiocassette Et de la cristalline voix de soprane de ta chère Marie-Hélène. C'est ainsi qu'autour de nos tables de cuisine Ont retenti nos premières chansons à boire Bien avant que trente vignerons chantants Fassent un soir vibrer les voûtes d'ogives de l'abbatiale de Villers Et même les murs de la Cave coopérative de Pont Saint Esprit.
Tout ce savoir-faire viticole étant construit Tu as proposé un jour …de le faire savoir. Une fois de plus, te voilà précurseur, cherchant des liens Entre les moines et le vin Parcourant abbayes et vignobles, recoupant tes sources Créant une magistrale documentation de la viticulture monastique. Si à présent nous recevons des centaines de visiteurs par an Au vignoble et au chai de Villers, C'est d'abord à toi que nous le devons.
Permets-moi encore d’offenser ta naturelle modestie, Ton humilité, si bien ancrée dans la Règle de Saint Benoît, En rendant hommage à ta vie de guide de l'Abbaye de Villers-en-Brabant. Admiration et hommage te soient rendus Au nom de notre communauté de guides cisterciens. Et merci à toi, Jean, de cœur à cœur De cette passion que tu as su nous transmettre et partager.
L'éloge funèbre s'écrit à l'imparfait …mais pas le tien, cher Jean. Tu étais, tu es et tu seras Notre guide. Tes textes fondateurs sur la viticulture, les abbayes et le vin Les membres de la Confrérie du vignoble s'en inspireront, Les diffuseront par notre site internet, aux visiteurs … et aux travailleurs.
Merci à Marie-Hélène, à vous, enfants et petits-enfants De nous avoir si généreusement prêté Jean, Ses mains, son cœur, son esprit.
Merci enfin à toi, Jean, de nous avoir tant inspirés, De nous avoir montré la liberté La liberté de chanter, d'entreprendre, d'aimer, Celle de masser, de chercher, de partir en marchant Sans savoir au juste comment sera la fin du jour, Ni le bout du chemin.
Merci cher Jean de nous avoir montré Que la bienveillance, l'accueil, les bras ouverts C'est la vie, la vraie, la seule à retenir Sur nos chemins de vignerons De Villers, de Torgny et d'ailleurs.
A notre tour aujourd'hui De refermer les bras sur toi Et de te dire avec douceur Bon repos dans les vignes du Seigneur !