Elle est blonde. Son visage est rieur, son regard pétillant. Certes, le temps qui passe n'a pas épargné ses traits, et quelque ridules apparaissent autour des yeux. Mais elle est encore belle. Elle le restera.
Agréable à regarder, donc. Heureusement, car son propos, lui, m'ennuie diablement. Consacrer une heure à dire ce qui aurait pu l'être en trois minutes, ou, mieux encore, via un simple e-mail avec ou sans pièce jointe, ce n'est pas donné à tout le monde. Il est des gens singulièrement doués pour cela.
Je réprime une furieuse envie de bailler. Ca ferait mauvais genre. Et dire que c'est moi qui ai sollicité cette entrevue. Bien fait pour moi, tiens ! Fallait-il que je ne sois pas dans mon état normal, pour accepter un rendez-vous par un samedi matin où j'aurais pu être au vignoble.
Quelle heure est-il ? Je n'ose regarde ma montre, ce n'est pas poli. Mais je parviens, au prix d'un effort oculaire intense, à consulter celle de mon interlocutrice sans qu'elle le remarque : il est midi moins le quart. A Villers-la-Vigne, mes confrères sont à l'oeuvre depuis ce matin, pour une noble cause. D'ailleurs, ça va bientôt être l'heure de l'apéro.
Pendant ce temps là, moi, je reste planté là comme une parfaite andouille, tandis qu'elle dilue le même propos pour la n-ième fois depuis tout à l'heure, comme on touille la panade. Ca n'en finira donc jamais ?
Eh oui, mes amis, il est des jours comme celui-là où l'esprit s'égare, où la confusion s'installe, où l'on ne discerne plus l'essentiel du superflu. Où, de préoccupations illusoires en causeries inutiles, l'on oublie pour un temps la vigne et le vin, l'amitié et le partage.
Il est des jours où on ne vient pas au vignoble, alors que les confrères s'y trouvent. Et on le regrette ensuite.